Evard André
(1876-1972)
Huile sur panneau de bois, datée au dos 1933
46 cm x 56 cm
En bon état
Cadre d'origine offert
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Ref : E31-20A

EVARD André (1876-1972), peintre surréaliste
Né le 1er juin 1876 à Renan (BE), mort le 23 juillet 1972 à La Chauxde-Fonds.
De 1905 à 1909, Evard suit un apprentissage de bijoutier-joaillier à l'Ecole d'art de La Chaux-de-Fonds, et fréquente parallèlement le Cours supérieur de Charles L'Eplattenier.
Il effectue dès 1907 de nombreux séjours d'études en Italie et en France. Evard expose en 1924 et 1925 au Salon d'automne et en 1925, 1926, 1927 et 1931 au Salon des indépendants de Paris. Une rétrospective lui est consacrée au Musée des beaux-arts de La Chaux-de-Fonds en 1951.
Bibliographie: Jean-Marie Nusshaum, Lucien Schwob, André Evard, Grandson, 1972.
André Evard peintre du soleil.
Le peintre chaux-de-fonnier André Evard après des oeuvres de jeunesse dans la voie du symbolisme, de l'art nouveau puis d'un cubisme qui fait l'avenue de ses futures abstractions, le peintre établit sa vision dans une voie si personnelle qu'elle lui vaut les ostracismes tenaces du bien-pensant artistique local.
Cela n'empêche pas ce passionné de planter jusqu'aux ultimes moments de sa vie, achevée en 1972, ses paysages aux pâtes lourdes incandescentes de ciel. Au centre d'un soleil qui défie et se confie au-delà du bon goût, n'ose-t-il pas, cet insensé, poser sa signature en remous de ruisseau ?
Une création forte et déboussolante.
(Extrait d'un article paru le 24 septembre 1992 lors de la rétrospective organisée à Thielle par Pierre von Allmen "80 ans de création au fil du siècle".)
Mort d'un grand artiste chaux-de-fonnier
L'Impartial - samedi 22 juillet 1972
Tous les Chaux-de-Fonniers et tous les amis des arts d'ici et d'ailleurs apprendront avec chagrin la mort du peintre André Evard, survenue à son domicile de la rue des Tourelles alors qu'il était entré dans sa 97e année, ayant atteint l'âge de 96 ans le 1er juin dernier.
En 1971, il avait été fêté par ses jeunes camarades membres de la Société des peintres, sculpteurs et architectes neuchâtelois qui, cette année même, lors de l'exposition de Neuchâtel, en mai dernier, lui fit les honneurs d'une salle illustrant fort bien son art et sa longue évolution.
Après le vernissage il avait participé de fière humeur et jusqu'à plus de minuit, à la réception qui suivait, surprenant chacun par la verdeur de son langage et la vivacité de sa mémoire. Mais surtout le beau tempérament qu'il mettait à soutenir ses positions, attaquer l'art immédiatement contemporain, pourfendre autour et alentour.
Avec tant d'énergie et d'alacrité que, considérant le sien comme un cas objectif, il ne le désignait pas en disant « ma peinture », mais « la peinture d'Evard ».
En revanche, la dernière fois que nous lui avons rendu visite, il n'y a pas un mois, nous l'avons trouvé affaibli, déprimé, parlant de l'injuste oubli dans lequel il était tombé dans sa ville natale, se demandant où iraient les belles collections d'art qu'il avait constituées depuis le début du siècle.
Ses dernières années ont certes été assombries par des maux divers, en particulier des troubles circulatoires. Mais que l'on songe qu'à plus de 90 ans, il trottait encore d'un pas extrêmement rapide dans les rues de sa vieille ville à laquelle il était jalousement, voire férocement attaché, la défendant avec bec et ongles, regrettant ses beaux vieux espaces, ces volumes d'un style si particulier, d'une géométrie originale, qu'il eut fallu souligner et qui disparaissaient sans que l'on y prit garde !
La Chaux-de-Fonds est en train de perdre son âme, c'est cela qui m'attriste, non pas que son visage change, mais qu'il ne change pas bien.
FILS ESTHÉTIQUE DE L'EPLATTENIER
Ce Chaux-de-Fonnier exemplaire n'était pourtant pas né ici, mais tout à côté, à Renan. Ses parents vinrent exploiter la confiserie du Casino, actuellement bureau de tabac. Lui-même apprit le métier de confiseur, puis exerça la profession de libraire, passionné qu'il était déjà de livres d'arts et de couleurs.
A peine plus jeune que L'Eplattenier (né en 1874), il se précipita, au Cours supérieur de composition et de décoration institué au début du siècle par le grand Charles à la barbe fleurie. Il y rencontra le futur Le Corbusier, le sculpteur Léon Perrin, Georges Aubert, bientôt Charles Humbert, Madeleine Woog.
De cet assez prodigieux bouillon de culture qui régna dans les arts chaux-de-fonniers de l'époque, tout éblouis des découvertes que leur faisait faire le maitre, André Evard sortit avec, un bagage étonnamment vaste et des appêtits plus ambitieux encore.
Dès 1905, il collaborait avec Charles-Edouard Jeanneret, par exemple à la première maison de celui-ci, Chemin de Pouillerel 1, où on le voit avec Octave Matthey (qui voua à son ami d'alors, Le Corbusier, une haine inexpiable, esthétique s'entend), en train de gratter les solides graffiti d'origine qui l'ornent encore.
Il participa sans doute aux fameux « Ateliers d'art réunis » d'où sortent divers édifices et ameublements, des expériences fabuleuses qui, dans le domaine de la création de la forme, vont du cercueil au monument historique, au génie civil, au bracelet-montre : bref, à tout. Mais Evard resta très attaché à Le Corbusier, d'un bout à l'autre de sa carrière.
SON ŒUVRE
Si Evard fut une sorte de novateur, c'est surtout dans le domaine de la couleur. Ayant retenu la leçon des Japonais et des Chinois (estampe), des impressionnistes et des cubistes (transmutation et autonomie de la couleur, importance essentielle de la lumière), il s'était formé une doctrine esthétique qui affirmait la primauté du volume dans l'art occidental né de la Renaissance, et par conséquent déniait ou reniait tout art informel, toute peinture sans perspective (chez lui la perspective était ou bien traditionnelle, ou bien géométrique, comme dans son importante période cubiste).
La « gamme Evard » s'emparait autant du paysage que de la nature morte, des fleurs. Il fit de ces lacs sanglants, de ces couchers de soleil fulgurants (les immenses couchers de Soleil jurassiens), ces Doubs d'un vert pétant ou funèbre, ces cerisiers éclatant de rires épars : cette flore fantastique qui déchainait la passion pour ou contre.
Les « Variations sur un thème » pour lesquels on l'accusait de cérébralisme ou, tout au moins, d'intellectualisme, ce qui passait pour une critique dans la bouche des « L'Eplatteniérisants ». En même temps, avec un soin extrême des matières sans cesse remises sur le métier, il s'appliquait aux profondes investigations cubistes, l'objet, ici, étant la peinture elle-même.
Amoureux de tout, des bijoux, joailleries, broderies, il amena sur ces toiles ces joyaux presque matérialisés dans les reliefs travaillés comme en bijouterie. Sans doute, ce «stylo Evard» ne dépassa-t-il pas le cercle des connaisseurs, mais ses expositions à Paris (Salon d'automne, Indépendants), à Zurich, déchaînèrent des querelles assez violentes, et ceux qui suivirent l'« école Evard » se reconnaissent d'assez loin, que ce soit en tant que peintres ou qu'amateurs d'art. Un jugement tranchant, un système de références très sûr amenaient Evard à enseigner avec autorité.
LE COLLECTIONNEUR
Dès que L'Eplattenier eut révélé à ses ouailles les splendeurs de l'estampe japonaise, Evard en acquit. Il choisit ses impressionnistes, ses Renoir (peintures et sculptures), ses Hodler, avec sagacité, à tel point que récemment encore, quand il devait se défaire (avec quel chagrin) d'une oeuvre, elle était acquise à des prix qui prouvaient la valeur.
Les Indiennes authentiques, cachemires, sculptures africaines, qu'il a réunies et dont la collection impressionnante lui reste, souhaitons vivement qu'elles demeurent en sa ville natale et enrichissent notre patrimoine et ne partent pas, comme certaines autres, ailleurs.
Il faudrait parler de l'idéaliste ( l'un des plus proches collaborateurs du pasteur Pettavel à la « Feuille du dimanche » jusqu'en 1932), du chrétien, de l'ami ( combien d'artistes il dépanna par des prêts et des dons, pas toujours payés de reconnaissance), enfin de cet amoureux de la nature qu'il fut toujours, dans son Haut-Jura ou à Montézillon, où il a inventé ses lacs inoubliables.
A Mme Evard, son infatigable compagne, à ses amis, nous présentons nos sincères condoléances. Une vie si remplie et dévouée aux plus hautes vertus spirituelles continuera d'enrichir La Chaux-de-Fonds, si celle-ci veut bien lui accorder foi et gratitude.
J.M.N.






































































